Il y a des romans qui vous donnent parfois l’impression curieuse d’être dans une salle de cinéma alors que vos yeux commencent à peine à glisser sur les mots des premiers paragraphes.
Le genre d’entame, qui d’emblée vous projette dans le décor au milieu des personnages et vous plonge au cœur de l’action. Pour un peu d’ailleurs, vous sentiriez presque l’odeur du sang et de la poudre.
« Retour à Watersbridge » fait incontestablement partie de ceux-là.
Nous sommes en 1897, dans l’état de New York. Elspeth Howell, rentre chez elle. Sage-femme de son état, elle revient auprès des siens après plusieurs mois d’absence, les bras chargés de cadeaux.
Mais en arrivant à la ferme familiale, c’est un carnage qu’elle découvre.
Son mari, ses enfants, gisent sur le sol, recouverts par la neige. Il ne faut que quelques secondes à Elspeth Howell pour comprendre que tous ont été abattus, presque à bout portant, à coup de fusil de chasse.
Mais à peine réalise-t-elle ce qui lui arrive qu’elle se fait à son tour tirer dessus, s’écroule et perd connaissance.
Quand elle revient à elle son fils Caleb, 12 ans, est auprès d’elle, seul survivant du massacre.
Caché dans la grange, il a tout vu du massacre. Et c’est lui qui a tiré sur sa mère pensant que les tueurs revenaient finir le travail. S’il s’en veut de cette méprise, il ne lui en dira rien , préférant la soigner et la préserver du froid pendant plusieurs jours, le temps qu’elle aille un peu mieux.
Dès lors, pour la mère et le fils, plus rien ne les retient en ce lieu de mort, où tout est anéanti.
La route devient alors pour la mère et le fils, leur seul horizon, le cordon les reliant aux assassins dont ils sont bien décidés à retrouver la trace. La piste va les conduire jusqu’à Watersbridge.
Mais avant de pouvoir leur faire rendre gorge, la route est longue, et il faut affronter cette nature inhospitalière qui les cerne ; La neige, le froid qui met à rude épreuve leur organisme déjà mal en point et leur détermination et dont il faut se faire un compagnon redoutable.
Non sans mal ils parviendront en ville. Mais dans cet univers masculin et violent, il faut survivre avant d’agir. Elle travaillera dans un entrepôt de blocs de glace se faisant passer pour un homme en portant les habits de son défunt mari, quand Caleb se fera embaucher dans un tripot mal famé.
Au fil des jour Caleb cherchera obstinément à acquérir une arme qui , une fois fait, ne le quittera plus en attendant de mettre la main sur les assassins de sa famille.
Les jours passent et la vie est particulièrement rude dans cette ville crasse et besogneuse. Cette misère et cette violence sociale dans laquelle l’auteur nous plonge n’a rien à envier à celle décrite par Victor Hugo en Europe à la même époque.
Tandis que Caleb rumine sa vengeance et apprend à grandir en attendant un signe du destin, sa mère elle, est rongée par son passé qui la ramène à ses longs mois d’absences où elle partait travailler à la ville comme sage-femme au service de notables des lieux.
Des périodes qui prenaient fin avec son retour à la maison familiale et l’arrivée d’un nouvel enfant dans le foyer des Howell, synonyme d’un lourd secret qu’elle porte depuis des années et qui pourrait bien être à la source du massacre qui a anéanti sa famille.
« retour à Watersbridge » est un mélange à la fois de roman noir et de western, avec au cœur de cette histoire, les liens du sang.
James Scott, dont c’est le premier roman, crée un univers insaisissable, mettant en scène des personnages dans le tumulte d’une nature dangereuse d’abord, et d’une ville ensuite, où la violence imprègne les lieux à chaque coin de rue.
Mais au milieu de cet environnement hostile, au cœur de la bestialité des hommes, le lecteur malgré tout, parviendra à trouver aussi beaucoup d’humanité à la suite de ces personnages en quête de rédemption ou sur les traces de leur identité, caractérisés à un titre ou à un autre par un manque ou une absence qui ronge les fondements de leur existence.
James Scott c’est aussi une véritable plume, tantôt explosive tantôt poétique, qui rends à la perfection l’atmosphère des lieux, l’état d’esprit des différents protagonistes, les sentiments confus qui les traversent, tout imprégnant son texte d’une très grande tristesse.
C’est au final un premier roman fort bien réussi qui n’est pas sans rappeler un auteur comme Ron Rash tant la puissance évocatrice de son écriture mérite la comparaison.
Une bonne suprise donc que nous offrent les éditions du Seuil, en espérant avoir très vite l’occasion de lire un prochain roman de cet auteur fort prometteur.
Wouh !! Une histoire et un décor qui semble en faire un bon bouquin….
c’est tout à fait çà !!! 😉
Il a l’air terriblement dur ce roman mais bien tentant aussi … .
🙂
tout à fait ! mais admirablement bien écrit aussi ! 🙂
J’ai également été conquis par l’atmosphère que l’auteur a admirablement exprimée. Amitié.
c’est vrai que de ce côté là il a su parfaitement la restituer. J’ai hâte de lire son suivant. 😉
J’aime ce genre d’atmosphère dans un roman. Merci pour la découverte ( mais pas pour ma liste que tu rallonges… 😉 )
j’espère qu’il te plaira ! tu me diras ! 🙂