« Le trou du cul du monde ». Qui n’a pas un jour employé cette expression grivoise pour évoquer un lieu perdu dans la campagne, perché sur un pic rocheux, ou terré au fin fond d’une vallée ?
En Australie, le trou du cul du monde s’appelle « Cotton ’s Warwick ». Planté dans le grand vide du Territoire du Nord , au milieu de l’Outback.
Une terre stérile, oubliée des dieux et des hommes, qui crépite sous le soleil carbonisant le jour, et se meurt sous le froid glacial de la nuit.
Sur cette terre sans promesse, seuls les bêtes sauvages semblent s’accommoder de ces conditions extrêmes.
Les bêtes, et puis eux. Les habitants de Cotton’s Warwick.
Ou plutôt, les survivants.
Ils sont une quinzaine tout au plus, qui rampent sur cette contrée désolante, accrochés à la vie comme un lézard sur son mur. Une poignée d’individus versés dans la dégénérescence et la perversion qui abandonnent chaque jour un peu plus au soleil qui les pilonne, des lambeaux de ce qu’il leur reste d’humanité.
Un groupe constitué quasi exclusivement d’hommes car toutes les femmes du lieu sont mortes, sans trop que l’on ne sache ni comment ni pourquoi.
Toutes, sauf Karen, qui s’occupe de ce qui tient lieu d’hôtel et de pub dans ce patelin maudit qui ne voit jamais personne hormis le doc qui vient de temps en temps avec son hélico pour les urgences médicales et qui repart fissa, et un routier de passage qui se déleste de quelques cartons dont se nourrit le trafic des habitants du lieu.
C’est là d’ailleurs, dans ce QG improvisé qu’ils se retrouvent pour boire, se disputer, et s’enquérir de leurs affaires qui leur permettent de survivre dans ce chaudron infernal.
A la tête de cette tribu, Quinn, un ranger qui fait aussi office de prêtre et qui veille sur son troupeau avec la tendresse d’un pitbull.
Veillant à refréner à l’égard de Karen les pulsions de ces mâles en abstinence, il espère bien en récompense finir par avoir pour lui seul ses faveurs.
Pourtant c’est vers un autre homme que le regard de Karen se porte. Sur l’Autre, un homme qui vit à l’écart de leur groupe et qui passe son temps à dépecer du kangourou dans son abattoir et qui, au grand désespoir de Karen, reste sourd à ses avances.
Sous la férule de Quinn, tout ce petit monde vit dans un équilibre tendu et précaire. Et il ne faudrait pas grand-chose pour que cette fragile cohésion ne vienne à voler en éclat.
Or justement, des événements incompréhensibles vont toucher cette petite communauté.
C’est d’abord le corps de Pat le menuisier que l’on retrouve perché sur un poteau, complètement brûlé par le soleil. Puis ce sera le tour de Mitch le routier de passage tué par un razorback, avant que d’autres victimes ne suivent.
Des morts incompréhensibles, injustifiées et inexplicables qui vont faire exploser toutes les barrières, à commencer par celle de la raison.
Car Michaël Mention n’est pas tendre avec ses personnages ! Pris dans ce contexte cataclysmique où la nature semble vouloir régler ses comptes avec le genre humain, ces derniers vont peu à peu s’enfermer dans un huit clos démentiels, et entreprendre une plongée vertigineuse dans la déliquescence la plus absolue.
Violence, débauche sexuelle, beuverie, autodestruction, tout semble s’effondrer dans un maelström généralisé qui avalent les hommes les uns après les autres dans ce coin de désert australien effacé du monde.
« Bienvenue à Cotton’s Warwick » est sans doute le roman le plus barré de Michaël Mention. Celui-ci vous plonge dans quelque chose de monstrueux, qui se déchaine à la limite du fantastique, sans une seconde de répit. Vous vous enfoncez à la suite de ces abrutis dégénérés dans la fange la plus sombre que l’homme peut porter en lui.
Magistralement maitrisé du début à la fin, ce roman rock and roll , déjanté et apocalyptique , qui ne manque pas de faire des clin d’œil récurrents à Hitchcock et au cinéma australien, prouve encore s’il en était besoin que Michaël Mention est bien un auteur de talent , capable d’emmener à chacun de ses romans son lecteur là où il ne s’attends pas aller.
Le style dépouillé, les dialogues rêches comme du papier de verre retranscrivent parfaitement cette atmosphère de fin du monde et fait de cet exercice est une vraie réussite.
Néanmoins, si le roman m’a fait passer un excellent moment de lecture, si c’est le genre de bouquin déjanté que j’aime parfois avoir entre les mains, je dois avouer que dans l’œuvre de Michaël Mention ce n’est pas celui qui m’aura le plus impressionné.
Sans doute parce que ce genre d’univers ne m’est pas inconnu, sans doute aussi parce que je devine (mais c’est un avis qui n’engage que moi) que ce roman a été pour l’auteur moins compliqué à écrire que les précédents ( je reste encore impressionné par l’incroyable exercice de son formidable « Jeudi noir » pour ne citer que lui) . L’impact de la lecture est donc moins fort pour moi.
J’ai l’impression que ce roman a été pour Michaël Mention un vrai moment récréatif, une sorte de pause jubilatoire avant l’arrivée prochaine d’un prochain roman qui lui demandera un travail d’écriture beaucoup plus dense et difficile.
L’avenir nous le dira, en attendant, ne boudons pas notre plaisir avec ce livre qui fuse et qui déchire comme une balle !
Je n’ai encore pas pu découvrir cet auteur 🙂 lequel me conseille tu?
je te les conseille tous ! je n’en connais pas un qui soit moins bon que les autres ! franchement tu ne seras pas decu ! La chance que tu as de ne pas le connaitre encore, ton bonheur n’en sera que plus grand quand cela sera fait ! 🙂
Cool 🙂 je cours alors chez mon receleur 🙂
il va te plaire j’en suis sûr ! 🙂
Ouh là , vu l’enfer que tu décris je crois ne plus être très sûre d’avoir envie de le lire ; ça a l’air super violent jusqu’à sentir presque les relents de chair massacrée …:-(
…Ou alors c’est une exagération volontaire pour un peu ” caricaturer ” le genre …
Help
non pas d’exagération du tout rassure toi ! mais comme je disais à Nathalie dans un autre commentaire c’est dommage car tu passes à côté d’un sacré bouquin mené tambours battant !! 😉
Peut être un peu violent pour moi. .. il est dans ma pal mais pas sûre que j’ose y mettre un oeil. ..
tu passerais à ^coté d’un super roman je t’assure ! 😉
rôôô il me faisait envie celui-là et après lecture de ta belle chronique, tu me fais plus que saliver ! bon bah…et hop un autre en plus sur ma PAL. Merci 😉
ah il dépote tu verras !!!! 🙂