L’EXQUISE NOUVELLE 3 : L’interwiew !

13 octobre 2013

L’exquise nouvelle n’est pas seulement une histoire d’écriture, c’est d’abord une magnifique aventure humaine qui signe aujourd’hui sa troisième année d’existence. L’occasion pour PASSION POLAR d’interviewer deux des chevilles ouvrières de cette belle histoire, David et Armèle.

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Le dernier coup de coeur de la souris

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David est le premier à passer sur le grill !

L’Exquise Nouvelle a aujourd’hui trois ans d’existence. Peux-tu nous en faire la genèse et nous en rappeler le principe ?

L’idée de départ vient de Maxime Gillio qui, voyant se télescoper de façon surréaliste deux statuts sur Facebook, s’est dit qu’il serait intéressant d’utiliser les contraintes du réseau social – à l’époque, les statuts Facebook sont limités à 420 signes – pour revisiter le cadavre exquis littéraire, faisant suite à de grands aînés, à commencer par les auteurs du premier roman construit sur ce principe, L’Amiral flottant écrit en 1931 par douze auteurs, dont une certaine Agatha Christie. Limite oblige, par un prompt renfort, nous nous vîmes quatre-vingts.

À l’origine, il n’était pas prévu que l’aventure se concrétise par une publication de l’Exquise Nouvelle saison 1 ? Comment en êtes-vous venus à envisager cette parution papier ?

Un coup du destin. Dans la même semaine, en plein milieu de l’aventure, nous avons reçu trois propositions d’éditeurs qui souhaitaient coucher l’aventure sur papier. Jamais l’idée ne nous était venue que ça puisse être un bouquin. Tout ça, c’était juste du fun. Et puis l’idée de proposer aux auteurs de reverser leurs droits à une association caritative s’est progressivement imposée. Que nos petites bêtises puissent être utiles, le principe nous a séduits et nous avons signé.

De même, il n’était pas prévu que l’Exquise Nouvelle perdure dans le temps. Pourtant, vous venez de clore la troisième saison. Comment expliquez-vous cette longévité ?

Nous avons lancé la saison 2 pour faire parler de la sortie du premier bouquin de l’Exquise Nouvelle. Le fantôme d’Agatha Christie a continué à planer sur nos têtes. Nous sommes passés du cadavre exquis des surréalistes aux exercices de style oulipiens. Un site internet a été créé pour l’occasion et s’est ouvert le jour de la commémoration des 35 ans de la mort de Raymond Queneau. Chaque participant devait écrire une nouvelle à partir des éléments suivants : « Une pièce. Autour d’une table, sept nains noirs. Sur cette table, le corps sans vie de Blanche. Tous les yeux sont rivés sur Armand Leprince qui vient de s’exclamer : L’assassin est dans ces murs ! ». Très logiquement, la saison s’est intitulée « Les 7 petits nègres ».

Puis, quand la saison 2 s’est vue honorée d’une sortie papier, nous avons lancé sur le web une saison 3 au concept à la croisée des deux premières saisons, en librairie depuis le 30 septembre sous le titre « Les Aventures du Concierge Masqué ».

Au cours des trois ans écoulés, l’Exquise Nouvelle a cependant évolué. Pourquoi et comment ?

Parce que c’est pénible de faire toujours la même chose. Et puis l’idée première, c’est de s’amuser. À chaque saison, nous souhaitions que les auteurs prennent du plaisir à écrire, que ça leur permette de sortir de leurs habitudes. Sur la saison 2, par exemple, Franck Thilliez s’est imposé un exercice de style qu’il n’aurait pu faire ailleurs. Il a écrit sa nouvelle sans utiliser la lettre « e », hommage à Georges Perec. Tout au long des trois saisons, nous avons fait appel à des personnalités, journalistes, chanteurs, libraires, dont le mot est le métier mais qui n’avaient jamais écrit de nouvelles.

Ce qui n’a pas changé, par contre, c’est notre volonté indéfectible de mixer les genres, de permettre à de parfaits inconnus d’écrire au côté de grands noms, d’associer des auteurs français et étrangers, pour certains non-francophones. Pour la dernière saison, nous avons accueilli Nicola Pearson, une dramaturge anglo-américaine et Víctor del Árbol, un auteur catalan.

Et pour cette troisième saison, quel principe avez-vous retenu ?

Dès le départ, il a été décidé que cette saison serait la dernière. Il ne faut pas abuser des bonnes choses. Notre volonté était de boucler une boucle. Nous avons mixé les concepts des deux premières saisons. Mi cadavre exquis, mi exercice de style. Le déclic est venu de ces livres pour enfants que les américains nomment « mix and match books », ces livres de personnages où l’on peut en créer de nouveaux en tournant indépendamment la tête, le corps et les jambes. Chacune des nouvelles est commencée par un auteur, un autre la continue et un troisième lui offre une fin d’anthologie. Petit plus du concept, aucun des auteurs ne savait avec qui il écrivait. Tous l’ont découvert sur le web. Et puisque nous avons ajouté treize auteurs supplémentaires à la version papier, certains ne savent pas encore le nom de ceux qui ont partagé leur plume. Quant au thème, il tient en deux mots : « Concierge Masqué ».

Depuis le début de l’aventure, l’Exquise Nouvelle est portée par eXquisMen. Un mot peut-être sur cette équipe de compères et votre activité ?

Sans Exquise Nouvelle, point d’eXquisMen. Maxime Gillio lance l’idée première, je m’y accroche telle une moule à son rocher barbu et Benjamin vient nous filer un coup de pogne dans la foulée. À ce moment-là, nous ne nous connaissons quasiment pas. J’ai rencontré Maxime une fois lors d’un salon et aucun de nous deux ne connait Benjamin. L’organisation de la première saison a été un travail de tous les instants, en flux tendu puisque nous devions gérer une participation par jour. On ne s’est pas engueulés pendant les quelques mois qu’a duré l’aventure. Mieux, on a kiffé sa race ce travail en commun. Plus tard, nous avons tous les trois décidé d’abandonner nos boulots respectifs et de monter la société eXquisMen.

Contrairement aux éditions précédentes, vous avez décidé cette année de prendre en charge vous-même l’édition de l’Exquise Nouvelle saison 3. Vous êtes donc éditeurs à part entière. Pourquoi ce choix ?

Une nouvelle fois, pour boucler la boucle. Et puis, c’est tellement bien d’avoir le « final cut » et de sortir exactement l’objet que nous avions en tête sans les contraintes inhérentes au travail en commun. Ce dernier opus est, de fait, celui qui nous ressemble le plus. Nous avons pu ajouter quatre nouvelles inédites par rapport à l’aventure web. Chaque nouvelle est introduite par un dialogue loufoque signé Frédéric Schweyer, suivi d’une page hommage aux héros masqués de notre enfance, plus ou moins éloignée, dans un esprit proche de l’Impossible Dictionnaire, ma marotte. En tout, c’est environ soixante-dix pages inédites que découvriront nos fidèles du net. Ça nous a permis aussi de sortir le livre de 256 pages avec couverture rigide à 10,00 euros.

Cette année, l’achat de ce recueil de nouvelles sera aussi l’occasion pour son acquéreur de faire un geste utile. Tu peux nous en dire un mot ?

À chaque saison, nous avons choisi une association différente. Pour la première, les droits ont été reversés à « Écoute ton cœur » qui vient en aide aux enfants autistes. Pour la deuxième saison, nous avons choisi « Les p’tits courageux », l’association des enfants porteurs d´une facio-craniosténose syndromique. Le choix de la dernière saison nous a été suggéré par Richard Contin : l’APCH, l’Association des Pancréatites Chroniques Héréditaires. Je vous conseille la lecture de l’article de la présidente de l’association à partir de ce lien (http://www.concierge-masque.com/en3/message-de-nadine-meslet-presidente-de-lapch/)

Les lecteurs peuvent-ils encore se procurer les recueils des saisons 1 et 2 ?

Oui, bien sûr. Soit par les biais habituels, soit en passant par le site internet des éditeurs :

 saison 1          saison 2

Armèle est une autre cheville ouvrière de ce magnifique projet :

Armèle, tu as rejoint depuis l’année dernière l’équipe qui orchestre l’Exquise Nouvelle. Peux-tu nous dire le rôle qui est le tien dans l’organisation ?

Je joue le rôle de la fille.

Non, sérieusement, pour cette troisième saison, mon rôle a consisté essentiellement à gérer les textes, à faire le lien entre les auteurs et à faire en sorte que l’exercice soit pour eux avant tout un plaisir et non une contrainte.

Cette année, l’Exquise Nouvelle a donc associé trois auteurs. Des écrivains connus et des anonymes. Comment as-tu fait pour constituer les trinômes et réussir l’alchimie des talents ainsi regroupés ?

Depuis le début, la philosophie de l’Exquise Nouvelle a toujours été de promouvoir la mixité, de mêler des auteurs confirmés et des auteurs amateurs. C’est donc cet esprit qui nous a guidés pour la constitution des trinômes.

Nous avons également tenu compte de l’univers des auteurs, de leur style. Cette année, la sélection a été particulièrement riche et diversifiée : auteurs de polars ou de thrillers comme lors des saisons précédentes, mais également des auteurs de littérature blanche, fantastique, des chanteurs, des journalistes, des blogueurs et même une dramaturge anglaise. Nous avons essayé de constituer des couples explosifs, improbables, d’entraîner certains hors de leurs sentiers battus, ou au contraire, nous sommes fait plaisir en réunissant des talents dont nous savions qu’ils se marieraient bien ensemble.

Quoi qu’il en soit, les aléas du direct étant ce qu’ils sont, notre petit tableau des trinômes a connu de nombreux bouleversements au cours de l’aventure, et la magie a parfois opéré « à l’insu de notre plein gré », le hasard et les circonstances faisant parfois bien les choses.

Détail amusant, aucun ne connaissait les deux autres personnes avec qui il devait composer l’histoire. Comment s’est donc déroulé le travail d’écriture ?

Effectivement, les auteurs ignoraient totalement avec qui ils seraient associés. J’étais leur unique interlocutrice. Ils ont d’abord reçu un message leur indiquant leur position dans le trinôme, tête, corps ou jambes de la nouvelle.

L’auteur de tête me faisait parvenir son texte, et une fois validé avec lui, je le transmettais à l’auteur chargé d’écrire le corps. À réception du second texte, mon rôle consistait à vérifier la cohérence du récit par rapport au début de l’histoire, à ne négliger aucun détail, pour que le passage de relais soit le moins visible possible et que le dernier auteur puisse finir la nouvelle en beauté. Chaque auteur disposait d’un nombre de signes limité, il fallait donc veiller à ce que l’intrigue avance suffisamment dans la seconde partie, et qu’elle ouvre des portes de sortie pour le dernier auteur. Une fois le corps validé, je transmettais les deux premiers textes (sans indiquer l’endroit du passage de relais) à l’auteur chargé des jambes, et rebelote…

Il a parfois été nécessaire de faire des coupes, d’opérer des changements de direction ou de revoir certains détails qui ne « collaient » pas, mais les auteurs sollicités se sont toujours prêtés au jeu avec le sourire.

Tu as donc fait le lien entre tous ces auteurs qui avançaient dans leur aventure sans connaître leurs compagnons de route. Certains t’ont-ils offert des chocolats ou livré des fleurs pour que tu leur lèves le voile sur leurs collaborateurs ? 

Tu en as de bonnes idées, toi, dis-donc ! Elle doit être comblée, ta femme. Eh ben non, même pas. Pas une rose, pas un carré de chocolat…

Par contre, les auteurs étant des animaux à part, ils ont essayé de me soudoyer avec des mots, avec leurs mots : outre les questions l’air de rien, les perches tendues pour essayer d’obtenir l’info, certains m’ont envoyé des textes, des nouvelles, ou leur dernier livre, et j’ai même eu droit à des poèmes, dont un en alexandrins spécialement écrit pour moi. Finalement, ça vaut bien un bouquet de fleurs ou une boîte de chocolats, non ?

Il va sans dire que je n’ai pas cédé à leurs sirènes et que le secret a été gardé jusqu’au bout.

Cette année, le thème tournait autour d’un personnage bien connu sur la blogosphère dédiée aux littératures policières, tu peux nous en dire un mot ?

Pour cette troisième saison, David a eu l’idée de choisir comme thème le Concierge Masqué, avatar de Richard Contin et nom de son blog consacré aux auteurs de romans noirs. Richard est vraiment concierge dans la vie, et c’est un passionné de littérature policière et un grand amoureux des auteurs qu’il interviewe avec beaucoup de talent. Il nous a semblé que ce personnage était très riche et pouvait inspirer de nombreuses histoires, avec son masque et son balai. Et le résultat a été au-delà de nos espérances…

Quel bilan tires-tu de cette expérience ? As-tu été surprise du résultat de certaines équipes ?

Un bilan extrêmement positif. L’Exquise Nouvelle a prouvé une fois de plus que sa vocation était de rassembler les auteurs, de créer du lien, des échanges, des rencontres autour d’une passion commune, la littérature, le plaisir d’écrire, de raconter des histoires.

Et le jeu littéraire, qui est la raison d’être de cette aventure, a effectivement donné lieu, cette année, à des résultats surprenants. Le fait d’écrire à l’aveugle a, je crois, poussé les auteurs à se surpasser, à sortir du confort de leur univers habituel. La plupart n’ont d’ailleurs pas eu le choix, obligés qu’ils étaient par leur(s) prédécesseur(s)… C’est ainsi que certains auteurs connus, au style très identifié, ont dû composer une partition inédite, empêchant même leurs lecteurs les plus fidèles de les démasquer dans le trio.

Globalement, comment juges-tu le cru 2013 ?

Excellent ! Le meilleur cru de l’Exquise Nouvelle, cela va sans dire. (Ben oui, hein !)

La diversité des auteurs, le mélange des genres lié au concept et le thème ô combien original du Concierge Masqué ont donné naissance à des nouvelles incroyablement variées : du noir, bien sûr, du thriller, du policier, mais également de l’anticipation, de la poésie, de l’Histoire, du drame, du cartoon, du comics, du loufoque, et même une version revisitée des « liaisons dangereuses » avec une comtesse pas banale.

Bref, il y en a vraiment pour tous les goûts et l’on ne s’ennuie jamais.

Malgré le thème commun, aucune nouvelle ne ressemble à une autre et l’on change d’univers à chaque fois, parfois même à l’intérieur d’une même nouvelle. C’est ce qui fait toute la richesse de ce recueil.

As-tu une ou deux anecdotes croustillantes ou amusantes sur cette troisième saison ?

Qu’entends-tu exactement par « croustillantes » ?

Non, parce que notre devise à l’Exquise Nouvelle, c’est : mixité, rencontres, échanges, d’accord, mais tout ce qui relève de la vie privée de nos auteurs ne-nous-re-gar-de-pas.

Pour les anecdotes amusantes par contre, j’ai l’autorisation de tout dire…

La première chose qui nous a amusés (et fait plaisir), ce sont certains de nos exquis auteurs se rencontrant sur des salons, faisant connaissance (j’ai dit « amusantes », hein, pas « croustillantes ») et se racontant leurs histoires respectives pour essayer de deviner s’ils ne faisaient pas partie du même trio.

Certains se sont même trouvés, comme Gérard Coquet et François Lefebvre, co-auteurs de la nouvelle « Le con qui s’adore ». Gérard, qui était en charge du corps de la nouvelle, a raconté le début de son histoire à François, lui expliquant qu’il pensait qu’il avait été écrit par une femme. François a reconnu son texte, mais, grand joueur, il a gardé le secret et fait comme si de rien n’était.

Sinon, pour revenir sur le déroulé du travail d’écriture et le mélange des genres, je pourrais citer les réactions d’auteurs recevant leur texte : « Euh, mais on n’était pas censés écrire une nouvelle policière ? », « Ah ouais, quand même ! Elle s’est lâchée, ma tête ! », « Oh putain, les salauds ! », j’en passe et des meilleures.

Ce fut un bonheur pour moi d’assister aux réactions des auteurs pendant l’écriture, mais également au moment de la mise en ligne, par exemple quand deux copains comme Bernard Minier et Michel Bussi ont découvert qu’ils faisaient partie du même trio, ou quand Evelyne Godillot, auteur amateur, a frôlé la syncope lorsqu’elle a appris qu’elle avait partagé la plume avec Victor del Arbol.

Je retiens aussi la joie de Maxime Gillio apprenant que ses jambes n’étaient rien moins que celles de Didier Daeninckx.

Et pour terminer en beauté, me reviennent enfin des échanges surréalistes de mails avec Ludovic Lavaissière et Maxime Gillio pour savoir si on met des « s » à « couille molle » et si « putain de » s’accorde au pluriel.

Bon, je vais peut-être m’arrêter là, sinon on en a pour la nuit, hein…

(Ce qui prouve, s’il en était besoin, combien cette saison 3 fut riche en temps forts et en émotion.)

Voilà, il ne vous reste plus, si nos deux compères vous ont convaincu de partager l’aventure d’aller chez votre libraire commander votre exemplaire !!!

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©Hippo

5 Commentaires

  1. belette2911

    Merci mon petit mulot ! Tu viens de donner la ration de chair fraîche au Cannibal ! Génial le fait que les auteurs ne sachent pas avec qui ils travaillaient. Oui, c’est croustillant et marrant. J’adore les interviews d’auteurs, d’éditeurs…. M’faut ma dose. 😉

    Je pense que si je croise la route du livre, je lui sauterai dessus.

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    • La petite souris

      surtout n’hésite pas ! saute lui dessus, empare toi en ! ne le relâche pas !!!! il ne se laissera pas faire facilement mais une fois apprivoisé il te donnera pas mal d’émotions j’en suis sûr !! 🙂

      Réponse
  2. Malavallon

    Bien l’interview,il y a du répondant, il va bientôt falloir penser à la politique !!!

    Réponse
    • La petite souris

      ha j’avoue que j’ai eu plaisir à la faire cette première interview de Passion Polar nouvelle formule !!! 🙂

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  3. Johnk885

    Very informative post.Really thank you! Awesome. defggbkdffkb

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