Nous sommes en France, dans les années 80. Pas tout à fait celles que certains d’entre nous ont connues, car l’auteur opère un léger décalage avec la réalité de l’époque, sans doute dans un souci de se libérer des contraintes historiques du moment.
Elle s’appelle Louise. Elle vient de liquider les responsables d’un groupuscule d’extrême gauche. Une mission d’infiltration sur laquelle elle était engagée depuis près de trois ans pour remonter jusqu’au sommet de l’organisation et la décapiter.
Louise Lassauve, c’est son nom, travaille pour la Police de sûreté et de surveillance.
Cette administration policière crée à la fin des années 50, aux moyens sans limites (pensez donc, les agents roulent en Alpine A310 ! ) a eu pour caractéristique, dès sa constitution, d’échapper à tout contrôle judiciaire.
Chargée de la lutte antiterroriste, elle s’occupe surtout des basses œuvres de la République. Au fil des ans, sa place et son importance sont allées croissantes au point de susciter des jalousies farouches au sein des autres corps de police.
Pourtant les temps changent. Son rôle, ses prérogatives, jusqu’à son existence sont remis en cause. Au fil du temps ses budgets sont réduits.
Le pouvoir politique ne veut plus d’une organisation étatique qui ne soit pas sous contrôle, dont les compétences s’exercent au détriment du respect des libertés publiques et du citoyen.
Pour le boulevard Soult, surnommé La Boîte, les jours sont comptés. Et ce n’est pas le succès de la mission de Louise qui changera quelque chose à la question.
Quant à Louise justement, Si elle comptait en tirer bénéfice pour prétendre à un poste en Afrique, elle en est pour ses frais. La belle métisse se retrouve relayée aux affaires internes, sorte de police des polices.
Pire, convoquée par Laffont, le chef de ce service, elle se voit contrainte de travailler avec l’inspecteur Perrin, un vieux de la vielle qui a roulé sa bosse, tout en devant rendre compte à son supérieur, des moindres faits et gestes de son nouveau partenaire.
L’homme est en effet suspecté de connivence avec la PJ, l’ennemie jurée de la Boîte qui n’attend qu’une occasion pour porter le coup de grâce au boulevard de Soult.
Voilà donc ce duo improbable obligé de faire équipe. Entre le vieux briscard et la jeune métisse, les choses ne vont pas de soi.
Qu’importe, Perrin est sur une affaire particulièrement difficile et va devoir faire avec sa partenaire.
Il enquête en effet sur une série d’assassinats. Celle-ci est d’autant plus délicate qu’elle concerne d’anciennes figures de la rue de Soult.
En principe, La boîte n’enquête pas sur des affaires judiciaires, mais celle-ci étant directement visée, il est inconcevable de rester les bras croisés à regarder les gars se faire dessouder les uns après les autres sans réagir.
Et les investigations vont être particulièrement compliquées à mener. Du statut de chasseur à celui de gibier, la frontière est vite franchie.
Toujours borderline, jouant au chat et à la souris avec la brigade criminelle qui les piste, le duo ne pourra compter que sur lui-même pour démêler les fils de cette histoire qui a tout du règlement de compte.
La guerre des polices est une vieille tradition française, qui a inspiré bon nombre de polars et donné lieu à pas mal de films, plus ou bien réussis, autour de ce sujet. C’est dans cette tradition que s’inscrit le premier roman de Frédéric L’homme.
Certes, la Police de sûreté et de surveillance décrite dans l’ouvrage n’a jamais existé dans notre pays. Pour autant ce n’est pas les tentations qui ont manqué au cours de notre d’histoire d’instaurer une police politique, fut-ce t-elle républicaine. Et de questionner jusqu’où peut aller un Etat pour défendre une société démocratique?
Nous découvrons donc La Boîte. Une administration policière et étatique tout ce qu’il y a de plus légal, mais dont les jours sont comptés, remis en cause par un pouvoir qui a changé, et les coups de butoir d’autres services de police, à commencer par la PJ , qui veut lui faire la peau depuis toujours.
Enfant choyé de la République à sa création, doté d’un budget sans limites, on sent au fil des pages cette décrépitude qui est à l’œuvre, et que les choses ne sont plus ce qu’elles étaient.
Les Alpines A310 dont sont équipés les « boiteux » ne roulent quasiment plus faute de pouvoir être entretenues, les murs du boulevard de Soult sont défraîchis, une atmosphère crépusculaire pour un service qui n’est plus tourné que vers un seul objectif, sa survie.
« Les boiteux » est un roman comme aiment en lire les amateurs de roman noir.
L’action parcourt l’œuvre de l’auteur, et le premier chapitre vous met d’emblée dans l’ambiance. C’est parfois très cinématographique, et en tout cas admirablement bien maitrisé.
Si on sait peu de choses au final du passé de Louise et de Perrin, la combinaison de la fougue et de la jeunesse de l’une, à la ruse et aux méthodes « vieille école » de l’autre, donne au final un duo qui va peu à peu apprendre à se découvrir et à se faire confiance.
Frédéric L’Homme nous offre là un texte distrayant et très efficace, qui plonge admirablement bien son lecteur dans l’atmosphère des années 80 et dans cette guerre des polices qui a toujours nourri notre imaginaire.
Un très bon bouquin qui laisse présager d’un bel avenir pour cet écrivain qui signe là son premier roman.
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Alors moi, j’y suis restée totalement hermétique mais je suis dans ma période “j’aime que dalle” 🙂
Dommage.Espérons que ta période se termine vite 🙂
Je vais aller me renseigner sur ce livre…….à très bientôt……. Amicalement Lionel
j’adore tes retours de lecture ! je vois qui plus est tu es un lecteur vigilant ! il fallait la trouver l’erreur concernant la Seine et Oise ! je savais pour le 78 vu que j’y suis né juste avant que ca ne devienne le 95 ( je crois l’année qui a suivi ma naissance me semble t’il). Sympa en tout xas cette histoire qui nous ramène à une autre époque, bien loin des flics hight tech dont nous abreuvent les series télé d’aujourd’hui ! ce fut une belle decouverte pour moi. Content que le roman t’ait plus également ! 😉