Les auteurs germaniques ne sont pas légion dans le paysage du roman policier. Les auteurs nordiques tiennent encore le haut du pavé et surfent sur la mode scandinave, quand les anglo-saxons et les auteurs hexagonaux restent indéboulonnables des rayonnages. Difficile dans ces conditions de s’intéresser aux teutons et à leurs cousins germanophones. Pourtant, au milieu de tous ces ouvrages qui garnissent les étales des libraires, se trouvent les œuvres d’un auteur autrichien qui ,à lui tout seul, peut faire la nique à nombre de ses congénères européens !
Heinrich Steinfest fait partie de ces romanciers qui, quoi qu’ils écrivent, ne laissent pas indifférent. Soit vous adorez et dévorez l’histoire, soit vous n’avez pas le temps de détester parce que vous avez déjà refermé son roman au bout de quelques chapitres.
Car Steinfest est un univers à lui tout seul. Une imagination débridée qui se joue des codes du genre, qui ne s’interdit aucune frontière, aucune transgression et qui baigne son lecteur dans une illusion quasi permanente tout au long de son roman. Un écrivain iconoclaste qui donne au genre policier un relief tout particulier.
Lire un de ses livres c’est comme courir au milieu de drap étendus à l’air libre. Vous vous précipitez après une ombre, vous vous jetez à bras ouverts dans l’un d’entre eux, pensant vous en saisir quand elle vous échappe déjà et vous nargue d’un peu plus loin. Et à chaque fois vous ne saisissez que du vide.
Pour celui qui se laissera imprégner par la plume et par l’imaginaire de Steinfest, c’est une aventure hors du commun qu’il vivra, pris dans le shaker d’un scénario où il aura tôt fait de perdre ses points de repaires. Car aucun roman de l’écrivain autrichien ne ressemble à un polar de facture traditionnelle. Si c’est que vous recherchez, passez donc votre chemin.
Si par contre vous recherchez l’inattendu, si vous êtes prêt à concevoir l’inconcevable, si vous aimez à vous balader dans l’esprit labyrinthique d’un auteur de talent, alors ” Le poil de la bête” est pour vous !
Anna Gemini est une femme seule comme beaucoup d’autres. Belle, intelligente, elle a un fils, Carles, un enfant handicapé qu’elle surprotège . Pour subvenir à ses besoins et offrir à son garçon une hygiène de vie des plus remarquables, elle se doit d’assurer à son foyer des revenus substantiels. Pour se faire quoi de mieux qu’un travail artisanal, bien payé, qui ne demande pas beaucoup d’efforts.
C’est ainsi que lui est venue l’idée de devenir tueuse à gage. Et le fait est, que sans talent particulier elle s’acquitte de sa tâche avec un certain succès . Pour elle, tuer ne la contrarie pas plus que ca à partir du moment où elle considère que cela revient à éliminer une donnée d’un problème qui s’en trouvera du coup résolu.
D’ailleurs, elle a aussi pour principe que ce soit la victime, qui , sans le savoir, finance son propre assassinat.
Mais même dans l’exercice de ses fonctions, impossible de laisser Carl tout seul. Aussi l’accompagne t-il à chacune de ses sorties, s’arrangeant pour trouver sur place une âme charitable qui accepte de lui garder son fils quelques minutes, le temps de s’éclipser et de fondre sur sa proie.
c’est de cette manière qu’elle en vient à assassiner un jour l’ambassadeur de Norvège . Un meurtre que va mettre sur sa piste un bien curieux détective manchot, qui lui ne se sépare que rarement de son chien dont la fonction première semble être de dormir partout où qu’il soit.
Il est difficile de résumer un tel roman aussi insaisissable et je m’en tiendrai là, ne serait ce que pour vous laisser le plaisir de découvrir ces personnages hors normes, au comportement parfois surprenant, lancés à la poursuite d’une formule d’eau de Cologne élaborée par des chartreux et qui semble avoir de bien curieux effets secondaires.
Bourré de faux semblants, truffés d’humour, déboussolant à souhait , ” Le poil de la bête” est une montagne russe littéraire qui vous emporte pour ébouriffer vos sens et votre imagination. Un de ces romans dont la fraicheur et le tonus ravigote le lecteur et lui donne la satisfaction d’avoir lu quelque chose sortant vraiment de l’ordinaire.
Autant dire que ” Le poil de la bête” est tout bonnement un roman jouissif et qui fait démarrer l’année sur le bon pied !
©Hippo
Salut Petite souris, on sent bien que tu es emmerdé pour parler de ce livre, et c’est normal, on ne peut rien en dire, si ce n’est comme tu l’évoques, un roman indéfinissable avec de l’humour intelligent dedans. BIZ
haha non rassure toi Pierre , je ne suis pas du tout ” emmerdé” pour parler de ce remarquable bouquin ! Attention, ce n’est pas parce que je dis qu’il est difficile de le résumer qu’il est difficile d’en parler 😉 , au contraire même tant ce qu’il est important d’en dire tiens moins dans l’histoire, elle même parfaitement construite, que dans ce que le lecteur que je suis a pu ressentir du bouquin , de son atmosphère et de l’univers de l’auteur. En même temps, je crois que c’est le genre de livre qu’il convient de ne pas déflorer si on veut garder tout sa saveur et toutes ses surprises au lecteur visiteur qui ne l’a pas encore lu ! : ) BIZ et merci de ton passage ! je file chez toi tiens ! !! 😉
J’ai eu du mal avec “Requins d’eau douce” parce que j’avais la nette sensation de passer à côté de nombreuses notions philosophiques nécessaires à la pleine compréhension du roman…
je t’avoue Sandrine que je n’ai pas ( encore ) lu ” requin d’eau douce”, mais j’avais beaucoup aimé ” le onzieme pion” même s’il est aussi bien barré comme bouquin ! 🙂
Bonjour à mes deux amis,
Oui, Bruno, c’est comme cela que je m’appelle désormais, ainsi en a décidé Pierre. Il est vrai que pour apprécier Steinfest, il faut pouvoir mettre de côté tout ce que l’on connaît pour se laisser embarquer dans cette folle aventure. Le plaisir est là à chaque page, c’est complètement loufoque mais qu’Est-ce que j’aime cela. Je recommande chaudement à Pierre “Le onzième pion” et “Requins d’eau douce”. Amitiés.
Jean le Belge, ca fait quand même un peu caïd de la pègre tout ca 😉 haha Tu t’appellerais Bisounours de l’espace que je t’apprécierai toujours autant mon bon Jean ! ( et non mon jean bon !) Oui ce roman est fou, il est décoiffant , il est inclassable et c’est bien là son charme principal , ne rentrer dans aucune case ! Amitiés
Tudieu, un livre qui fait jouir !! Comment passer à côté de ça ?? 😀
Merci, mon petit mulot !
héhé jouissif, mais pas aphrodisiaque !! attention ! ( enfin le crois pas!) 🙂
Et bien…je dois avouer que je suis tentée…et oui…Je note donc sur mon ptit calepin!!!
attention, tu risques de ressortir décoiffée de ce roman ! 🙂