De la Grèce, vous restent-ils sans doute , cachés au fond du tiroir ,des souvenirs de votre enfance , quelques bribes éparses de cours d’histoire où vous avez admiré les prouesses conquérantes d’un Alexandre le Grand, le talent d’un peuple bâtisseur, la justesse des idées de ses philosophes ; quelques scènes cinématographiques aussi, de péplums où les hommes, héroïques, côtoyaient les dieux, où vous reviviez la sanglante bataille de Marathon, partagiez l’Odyssée d’Homère.
Sans doute aussi, devenu adulte, vous avez rêvé de profiter de vos vacances en sillonnant les îles de la mer Egée en trempant vos pieds cette eau bleue limpide , sirotant des verres d’Ouzo, dégustant des plats gorgés de couleurs et de soleil. Peut être même avez vous eu la chance de vous y transporter et de le vivre, ce paradis sur terre.
Mais aujourd’hui la Grèce est en noir et gris. Ses héros sont fatigués. Les cris transpercent les cieux, les poings se lèvent. La rue grouille et gronde de colère. Celle de la dignité. Celle du désespoir aussi. De ceux qui veulent rester debout et qui veulent qu’on les respecte.
La crise il parait. Celle qui déshabille, qui met à nu, qui fragilise et qui piétine. Avec pour bon soldat, le banquier, celui qui ment, mais dont sa vérité alliée à sa voracité font de lui animal avide et rapace. Avec pour complice l’Europe qui en même temps qu’elle fait les poches des grecs en les culpabilisant, continue de serrer le garrot, toujours un peu plus fort. Au risque de mettre à mal tout les liens de solidarités, les valeurs humanistes partagées qui fondent le vivre ensemble.
Car parfois les bras se tendent et les bouches éructent la haine, crachée au visage de l’Etranger, bouc émissaire de temps de crise. Les ganglions du cancer brun sont là, en gestation, prêts à se répandre dans cette société, berceau de notre démocratie.
Mais au milieu des cris , des pleurs et des coups, la vie continue. Les grecs ne sont pas morts.
Petros MARKARIS est grec lui aussi. Sa notoriété n’est plus à faire chez lui, et son talent à largement dépassé le cadre des frontières de son pays. Son œuvre est une chronique quotidienne de la Grèce d’aujourd’hui, sur laquelle il porte une regard sans concession ,sur ses contemporains et les affres qui affectent et parcourent la société hellénique.
Mis à part ce talent confirmé depuis longtemps, gageons que ce nouveau roman, “Liquidations à la grecque”, qui ouvre une nouvelle trilogie, a du recevoir un sacré accueil en Grèce, tant il couche sur le papier et offre par procuration à ses lecteurs, sans doute l’un de leurs fantasmes les plus chers en ces temps de turpitudes !
pensez donc !
En l’espace de quelques jours des personnalités de la banque, des finances, et d’agence de notation se font proprement étêter au sabre.
Et il n’y a pas qu’eux qui vont perdre la tête ! La police est en effet aux abois, car au même moment sont placardés sur les murs de la ville des affiches et des autocollants appelant les grecs à ne plus payer aux banques leurs crédits. De quoi mettre tout un système sous pression si cet appel incivique venait à avoir une résonance et un début de concrétisation auprès de la population .
Pour le commissaire Charitos, qui au même moment marie sa fille, tout est lié. il en a la certitude bien que le ministre se laisse convaincre du contraire par le chef de la police qui lui ,veut voir une affaire de terrorisme.
C’est donc à un véritable travail de fourmi que va se livrer son équipe pour remonter la piste du “Robin des banques”, le tout sous la pression toujours plus forte de sa hiérarchie.
Au delà de l’intrigue, le dernier roman de Petros MARKARIS vaut surtout par le fait qu’il est sans doute le premier à aborder la question de la crise de la dette grecque.
Celle ci transpire tout au long du roman. Dans la ville ( les grèves, les manifestations quotidiennes qui paralysent la circulation), dans la vie quotidienne de Charitos ( primes supprimées, départ à l’âge de la retraite repoussé), dans son enquête où l’auteur nous décortique avec des mots simples les mécanismes d’une catastrophe financière à l’œuvre.
Le lecteur est imprégné de cette atmosphère si particulière dans laquelle baigne la population grecque embarquée dans la tourmente. Il peut constater le mépris dont elle peut être victime , à qui on reproche ses errements mais aussi son outrecuidance à avoir du appeler à l’aide. Il perçoit la tension omni présente de cette population au bord de l’explosion.
Les roman de Petros Mankaris sont toujours emprunts d’humanité, et celui ci n’échappe pas à la règle.
Nous le suivons dans son enquête mais aussi dans son quotidien personnel (le mariage de sa fille, ses engueulades avec sa femme, la nouvelle voiture etc…) ce qui vient renforcer la portée de son propos, et nous fait toucher du doigt concrètement, que ce que l’on nous présente trop souvent comme une téléréalité dont on regarderait tous les jours un nouvel épisode , est bien le quotidien vécu par une société grecque qui n’en finit plus d’agoniser.
Ce roman de Petros MARKARIS n’est peut être pas le meilleur de l’auteur, mais il nous offre une intrigue policière en lien directe avec l’actualité du pays, offrant une vision de l’intérieur de cette société en perdition, déboussolée, qui ne maîtrise plus rien. Et il y a quelque chose de délectable à voir que dans ce roman, les victimes sont les financiers que chaque grec rêve un jour de faire rendre compte.
En attendant, le génocide social continue.
J’avais écouté cet auteur à Quais du polar cette année, et décidé de lire ses livres… Ma PAL étant ce qu’elle est, c’est resté un souhait, jusqu’à aujourd’hui, où ton article m’a décidée à concrétiser ! Merci.
Bonsoir Velda ! Veinarde que tu es d’avoir pu le rencontrer et l’écouter. malheureusement j’ai du annulé ma montée sur Lyon ( et ce sera encore le cas cette année malheureusement mais c’est pour une bonne cause). Ce roman est le premier d’une trilogie dont le second opus vient de sortir en grand format chez SEUIL ” Le justicier d’Athènes”, que je n’ai pas encore eu le temps de lire. En tout cas, un auteur incontournable, un témoin remarquable de son pays et de son époque ! bisou !
Quelle coincidence, je viens de terminer ce roman et de découvrir l’auteur dont Claude Le Noche avait dit tous le bien dans son blog “Actions Suspens” .
Et j’ai été conquis car comment à cet éclairage ne pas ressentir encore plus profondement la détresse du peuple Grec .
On ne peut s’empêcher d’être en pleine empathie avec ce commissaire Charitos, et à la limite de penser que les coupables de cette affaire ont bien raison de réagir violemment face à ces financiers qui les font littéralement crever de faim, Ceux là même qui les ont poussé par des méthodes frauduleuses à tricher pour entrer dans l’Euro, sont en train de les démolir au nom de cette pieuvre qu’est la finance.
Hélas tuer tous les banquiers du monde ne résoudrait pas ce problème , mais cela fait quand même un bien fou de l’imaginer .
Oui IL FAUT LIRE ce super bouquin !!!!!!
C’est du Thirrry Jonquet …. Cet auteur est dans la même ligne à mon sens que Donna Leon en ce qui concerne l’Italie et Henning Mankell pour la Suède
Amitiés et merci pour ton super boulot !
Bonjour Robert et merci beaucoup pour tes encouragements. Que rajouter de plus à ton commentaire si complet et si juste ! Voilà un roman en tout cas qui démontre bien s’il était encore nécessaire de le démontrer, toute la place et toute la force du roman noir dans la Littérature !!! Comme je l’indiquais en réponse à un précédent commentaire, le deuxième opus de la trilogie entamée avec “Liquidations à la grecque” est paru en septembre, je pense que tu ne manqueras pas de le lire ! A très bientôt j’espère et merci pour ta visite ! 😉
Excuses à Claude LE NOCHER, dont j’ai raccourci malencontreusement le nom
😉
Salut Bruno
Le roman noir inclut le témoignage social, ce que démontre bien ce(s) roman(s) de Petros Markaris. Belle intrigue et réalités actuelles. Amitiés.
Bonjour Claude ! je dirai même que lorsqu’il est aussi témoignage social il n’en est que plus fort ! c’est en tout cas ce roman noir là que j’adore ( mais je sais que toi aussi 😉 ) Amitiés
Hello, mon p’tit mulot !
Même les commentateurs se liguent contre moi pour nous dire tout le bien qu’ils pensent de ce roman ! 🙂 Vu que j’aime bien lire du social dans les polars, ça me ferais mal de passer à côté !
Merci pour ta chronique.
salut ma belette !!! 😉 Ce bouquin est à lire ! n’hésite pas ! il est pour toi ! 🙂
Bonsoir La petite souris, j’avais écrit tout le bien que je pensais de ce roman le 19/01/13 http://dasola.canalblog.com/archives/2013/01/19/26173633.html et je viens de terminer le tome 2 de cette “trilogie de la crise” : Le justicier d’Athènes : pas mal non plus. Billet en cours de rédaction. Bonne soirée.
bonsoir Dasola ! je guetterai ton billet avec impatience ! content qu’il t’ait plu, une raison de plus pour moi de l’acheter ! 😉 A bientôt !
Jamais lu cet auteur. Je ne doute pas de l’intérêt de lire un auteur grec concernant la situation dans son pays; certainement plus instructif que la plupart des articles de presse qu’on peut trouver chez nous sur le sujet…
ah c’est un très bon auteur que je te recommande ma Gridou ! et effectivement tu as une vision ” vu de l’intérieur” certainement plus crédible que l’ensemble des articles que l’on peut lire sur cette crise en Grèce, écrits d’ailleurs pour la plupart depuis Paris ! 😉
Merci encore pour ce très bel avis et cette conclusion qui claque !
Rien à voir avec cet auteur, mais ça me fait penser à la postface du dernier Donato Carrisi où il explique que tous ses droits d’auteurs venant de Grèce, resteront pour ce pays. Une goutte d’eau, mais chaque goutte d’eau est importante
Merci Yvan ! j’espère que tu auras l’occasion de lire ce roman ! je ne sais pas si tu as déjà lu quelque chose de cet écrivain mais je ne peux que te le recommander ! AMitiés
eh non je ne connais pas du tout, mais avec toi j’en découvre tous les jours 😉
😉
bonjour et merci beaucoup pour le lien !!!! désolé de ne te répondre que maintenant mais j’étais parti en vacances quand tu m’as laissé ton message et je ne suis rentré que depuis peu ! Merci encore !!!! et à très bientôt j’espère !!! :!:)