À croire que comme pour les canards sauvages, il y a une saison propice au braconnage du cocu citadin. Cette espèce assez commune en France, semble toutefois connaître sur les terres catalanes une promptitude à l’hécatombe, aussi fulgurante qu’une grippe aviaire dans un poulailler.
Pensez donc ! Une femme abattue dans une chambre d’hôtel en présence de son amant, un mari dépressif et trompé qui, sans plumes et sans élan, décide de prendre son envol du haut de son immeuble, et un autre qui séquestre sa femme adultère, imbibée d’essence au milieu de jerrycans, prêt à lui gratter une allumette pour un méchoui un peu trop cuit.
Tout ça fait est un peu excessif pour une ville comme Perpignan, surtout sur un temps si court. C’est en tout cas ce qui frappe Ménard, un des hommes du lieutenant Sebag en charge de ces affaires, mais qui pris dans ses problèmes personnels a du mal à bien du mal à se concentrer sur ces événements.
Car cette affaire tombe mal pour Sebag. Ce dernier voit lui aussi son couple se fissurer quand il découvre par hasard que sa femme le trompe avec un autre. Un hasard qui vient seulement confirmer ce qu’au fond de lui il pressentait depuis un moment.
Se disputer ? Se déchirer comme le font tous les couples face à cette faille béante qui s’ouvre brutalement dans leur histoire commune ?
L’amour peut aussi engendrer parfois, une surprenante sagesse pétrie de lucidité, qui fait prendre conscience que toute bataille est inutile, que le ciment qui peut lier un homme et une femme ne peut empêcher le temps et l’habitude de saper les fondements de ce qui pour un temps pouvait paraître indestructible, même quand l’amour existe encore.
Restent les mots, la tendresse, la complicité d’une vie partagée et cette petite flamme qui ne veut pas s’éteindre et tente de tenir bon face au vent mauvais.
Mais le doute est là, insidieux, corrosif. Et il est à l’œuvre. Alors il faudra du temps, peut-être.
Difficile dans ses conditions de faire la part des choses, d’y voir clair quand on navigue à vue au milieu des effluves de whisky et des volutes de fumée de cigarettes que Sebag consomme en grand nombre.
Tout aussi difficile d’empêcher son histoire personnelle d’altérer son instinct de limier, et de ne pas voir dans le désespoir de cet homme prêt à tout flamber, mais qui ne veut pas sortir du scénario de l’histoire qu’il partage avec sa femme, l’écho de sa propre détresse d’homme meurtri, qui aime encore.
Malgré tout, avec l’aide de son équipe, de Julie une jeune collaboratrice qui saura offrir une écoute et trouver les mots, Sebag finira par retrouver ses réflexes d’enquêteurs, son intuition affûtée pour pister le criminel.
Car derrière ces histoires d’amour qui finissent mal, les policiers vont découvrir que se cache, tapi dans l’ombre, un être malfaisant, un corbeau qui contacte les maris dupés et les pousse à l’action. Une enquête qui ne manquera pas de mettre en exergue les rivalités latentes qui tendent parfois les rapports entre Sebag et certains de ses coéquipiers.
En abordant le thème de l’adultère, Philippe GEORGET prenait plus d’un risque. Celui d’abord de ne pas intéresser un lecteur avec un sujet aussi banal qu’il peut être ennuyeux. Celui ensuite de s’enfermer dans une approche trop manichéenne du sujet, ou de noyer son lecteur dans un pathos étouffant préjudiciable pour la crédibilité de l’histoire.
Heureusement il n’en est rien. Celui-ci parvient au contraire, avec ce thème éculé, à écrire une histoire captivante quand elle n’est pas touchante à bien des égards. Car ce sont bien des personnages cabossés, malheureux et perdus, tentant de s’accrocher à un amour qui leur échappe que nous donne à aimer Philippe Georget.
Et il le fait avec beaucoup de tendresse et de douceur dans les traits qu’il esquisse sous sa plume, et dans les mots qu’il prête à ses protagonistes.
À côté d’une intrigue policière astucieuse, Philippe Georget explore avec empathie la descente aux enfers d’hommes et de femmes, qui aiment mais ne savent peut-être plus dire je t’aime, que la détresse d’une solitude redoutée pousse au bord du gouffre.
Encore une fois, Philippe Georget signe un roman de grande qualité, et confirme qu’il est et reste une des valeurs sûres des Éditions Jigal.
On ne peut qu’en recommander sa lecture.
Bonjour Bruno
Content de savoir que toi aussi tu avais aimé ce roman qui est plus qu’une intrigue policière
Amitiés
c’est vrai et c’est bien là tout le talent de l’auteur ! 🙂
De Philippe Georget, j’avais beaucoup aimé son roman “Tendre comme les pierres”, et je m’étais promis d’en lire d’autres… Je n’ai que l’embarras du choix, et ce dernier titre risque encore de me compliquer la tâche…
Amitiés mon souriceau.
celui ci devrait te plaire mon ami !!! tu m’en reparlera ! 😉