Et bien il faut croire que l’année 2025 sera une année millésime pour le roman noir politique !
Après l’excellentissime « Bleus, blancs, rouges » de Benjamin Dierstein , revoilà notre ami Frédéric Paulin de retour avec le deuxième opus de sa nouvelle trilogie consacré à la guerre du Liban , « rares ceux qui échappèrent à la guerre ».
Si vous êtes des fidèles du site, vous vous souvenez sans doute qu’au mois de janvier, j’avais eu le plaisir de vous présenter le premier tome, « nul ennemi comme un frère », un pur régale de lecture là aussi !
Ce second tome est dans la même veine !
Avec « Rares ceux qui échappèrent à la guerre », nous continuons notre exploration au cœur d’une époque où le Liban se trouvait dans l’œil du cyclone, déchiré par des intérêts multiples et d’innombrables lignes de fracture.
Dans ce deuxième opus dédié à cette guerre civile libanaise, Frédéric Paulin poursuit sa fresque riche et fascinante, où se croisent personnages fictifs et figures historiques, tout en dévoilant les nombreuses ramifications diplomatiques et politiques d’un conflit qui a dépassé largement les frontières du Liban.
Le roman s’ouvre dans une atmosphère crépusculaire . Nous sommes à Beyrouth en octobre 1983, juste après l’attentat qui a frappé l’immeuble Drakkar et décimé des soldats français.
Cet événement violent et tragique , déjà évoqué en clôture du premier opus, sert ici de point de départ pour mettre en lumière les liens étroits qui unissent le chaos libanais à la politique française.
Mais les choses ne sont pas si simples. En témoignent les noms de milices, de factions et de figures politiques qui se succèdent à foison, traduisant la complexité d’un pays où se croisent ambitions religieuses, luttes géostratégiques et rivalités familiales.
De l’influence de l’Iran, aux interventions israéliennes, en passant par la domination syrienne, auxquelles s’ajoute la diversité confessionnelle libanaise, Frédéric Paulin parvient à rendre tangible ce dédale de pouvoirs entrelacés qui s’imbriquent pour former un tableau, dont la cohérence émerge au fil des pages d’un récit méticuleusement documenté.
Et c’est à travers le parcours de ses personnages, rencontrés dans « Nul ennemi comme un frère » qu’il révèle précisément cette complexité géopolitique.
On retrouve ainsi Christian Dixneuf, commandant de la DGSE, qui porte le poids de ses regrets de n’avoir pu anticiper et empêcher l’attentat contre les soldats français. Mis sur la touche et rapatrié en France, il ne peut cependant se résoudre à l’inaction , surtout depuis que des français ont été pris en otage au Liban.
Michel Nada, d’origine libanaise, en pleine ascension politique en France, devenu député RPR gravite maintenant autour des plus hauts responsable de la droite française, tandis que Philippe Kellerman, conseiller intime de François Mitterrand, est lui, pris entre le deuil de son fils tué dans l’attentat du Drakkar, et des négociations politiques particulièrement complexes.
Enfin, la juge Sandra Caillaux et son époux Nicolas, policier impliqué dans la lutte antiterroriste, témoignent de l’onde de choc que cette guerre libanaise projette sur le sol français, quand parallèlement, Abdul Rasool al-Amine, membre du Hezbollah, incarne lui,

@H.Amiot
l’évolution d’une lutte acharnée au cœur des ruines de Beyrouth.
Ce qui impressionne, c’est la manière dont Frédéric Paulin insère ses personnages fictifs dans un cadre historique d’une grande rigueur, sans recourir à des simplifications ni altérer la richesse et la complexité de l’époque.
Les frontières entre alliés et adversaires se brouillent, tandis que les personnages vacillent, confrontés à l’immensité d’un conflit qui transcende la simple opposition idéologique.
Le roman s’étend sur la période 1983-1986, moment crucial où la France est directement touchée par l’extension de la violence.
Tandis que les enlèvements d’otages se multiplient au Liban, des bombes explosent à Paris, alimentant un climat de tension que l’auteur restitue avec une précision remarquable.
Les intrigues avancent en parallèle, mettant en scène tantôt les tractations secrètes menées par des intermédiaires proches des sphères du pouvoir, tantôt la traque d’activistes sur le territoire français.
On assiste ainsi aux manœuvres politiques dans les coulisses de la présidence, aux rivalités entre le camp socialiste et l’opposition, mais aussi à la panique grandissante dans les rues, où la menace s’installe durablement.
Chaque chapitre débouche sur de nouveaux enjeux, tout en conservant la cohérence générale d’une œuvre dont la finalité est d’éclairer notre compréhension de ce conflit complexe.
Le soin apporté à l’atmosphère – décombres à Beyrouth, couloirs feutrés des ministères parisiens, manifestations urbaines de la violence – renforce l’immersion, tout en suscitant une vive curiosité pour la suite.
Au final, « Rares ceux qui échappèrent à la guerre » s’impose comme un véritable trait d’union entre l’embrasement du Liban et son impact sur la France des années 80.
Il confirme surtout le talent de Frédéric Paulin à proposer un récit captivant, mêlant habilement la grande Histoire et la trajectoire intime de personnages bouleversants.
Pour qui souhaite appréhender les racines et les résonances du conflit libanais, cette trilogie, dont le deuxième volume se révèle particulièrement prenant, constitue une lecture incontournable.
On ne peut qu’attendre avec impatience le dénouement annoncé dans le prochain opus.
ACQUISITION: SERVICE PRESSE
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